17.1.15

Tu trembles 5

C'est un grand plaisir de jouer "Tu trembles". Les retours sont chaleureux et le public heureux qu'on lui parle du monde dans lequel il vit, là, maintenant. Après le spectacle, Anne, une amie, m'a envoyé ceci par mail : 
Notre dîner s'est passé sous le signe de ta pièce dont nous avons longuement parlé. D'abord, le plus simple, bravo pour la qualité du texte, la belle et intelligente mise en scène de Marie-Christine et le talent des comédiens, toi en premier. Le monologue du début "c'est fini" est d'une grande beauté et la façon dont tu le dis est frappante. Tous les comédiens sont excellents. Quant au texte lui-même, il nous a beaucoup intéressés et la conclusion c'est qu'on a intérêt à aller voir la pièce à plusieurs car plus on en parle et plus on y découvre de choses que l'on n'avait pas toutes saisies au premier abord, chacun apportant sa petite pierre à l'interprétation de certaines scènes. Beaucoup d'images fortes nous sont restées dans la tête…
Tenter de voir le monde qui nous entoure plus clairement, le temps de la représentation, en espérant que cela provoque la discussion. Voilà en effet ce qui me mène...

... tout commence...

... appelez-moi Madame...

...ça, ça m'intéresse...

... Dieu nous voit, tu crois... j'espère bien...


Le 24 janvier, à 22h30, après "Tu trembles", je propose un concert avec Lucas Barbier, notre musicien en scène tout au long du spectacle. Une grande première pour moi... Ci-dessous un des textes que je "chanterai"...

Vous partez j’arrive
Pas de chance
Nous nous croisons
- Le temps est trop court toujours trop court, dites-vous comme une fatalité
- Changeons de rythme, je vous réponds, passons de l’allegro à l’andante
- Quel ennui ce serait
Vous riez
Déjà vous êtes loin

Je pars vous arrivez
Pas de bol
Nous nous croisons encore
- Vous êtes intenable, dites-vous en me prenant le bras un instant
- C’est pour cela que vous m’aimez, je réponds je souris
- C’est sans solution, ajoutez-vous
Vous restez en suspension
Votre souffle tout près de ma joue
Les violons jouent crescendo
On se croit à Hollywood
Je vous enserre la taille
Vous ne résistez pas
Nos corps se prennent
Le temps se pose
Et depuis

Vous partez je ne suis pas encore arrivé
Je pars vous n’êtes pas encore là
Nous ne nous croisons plus
Le temps galope
Ça vibre entre les mains
Restent votre parfum
Le souvenir 
Un regard
Et les violons au loin.

15.1.15

Résidence au lycée Chennevière-Malézieux 2



Ma résidence au lycée Chennevière-Malézieux sur la thématique du cri se poursuit. Elle a parfois des prolongements inattendus. La semaine dernière un élève m'appelle dans la cour et me dit : 
Monsieur, on a pensé à vous. On était sur les Champs-Elysées au nouvel an. A minuit, on a crié comme des fous. Les copains qui ne sont pas du lycée se demandaient ce qui se passait !

Les bâtiments du lycée, eux-mêmes, crient. Une partie en effet est en démolition et les marteaux-piqueurs sont à l'oeuvre. Ailleurs on entame les fondations et on installe les échafaudages de la reconstruction. En un mot on lui triture les entrailles et évidemment il gueule. L'ambiance en salle de classe est par instant surréaliste. Voici un aperçu.

Là avant il y avait le CDI
Et là, des salles de classe...
Et là... on ne sait plus...

J'ai lu du Antonin Artaud au 3ème prepapro : "description d'un état physique". Je leur ai demandé ensuite de décrire ce que ça fait dans le corps quand on éprouve une émotion forte, concrètement, sans pour autant dévoiler ce qui a provoqué cette émotion. Cette intimité-là doit rester secret... Voici quelques textes...


Envie de courir partout
Le ventre qui gonfle ça gonfle et puis ça pète
Les bras contractés
Envie de combattre
Mes mains tremblent
Je suis énervé
J'ai la rage
Envie de shooter dans un ballon
Je suis énervé
Je change de visage
Tout mon corps tressaille
et mes jambes gonflent
Elles aussi
Je deviens plus costaud
Du sang
Tout rouge
Ah ah ah ah ah


Je plusieurs trucs me passent par la tête
Fort, pas fort
En forme, je mal
Je bien travaille ou pas
Je tremble
Je cœur bat trop vite
Mes muscles sont contractés
Je me regarde comme un monstre
Soudain je un sentiment 
Fort
Le plus fort
Musculeux
Mon regard qui fixe quelqu'un
Fort regarde
J'envoie la jambe 
Bouge comme
Je lâche tout
Mon corps comme un mur


Fatigue
Mes yeux pleurent
Mes yeux me brûlent
Mon visage devient laid
Je tremble
Je ne sens plus mon corps
J'ai envie de mourir
Mon coeur bat fort
On dirait que le monde ne tourne plus rond
Je n'ai plus peur de rien
Je ne peux pas regarder la personne en face de moi
Je ne suis plus moi-même
Pour redevenir moi-même, il faut un truc frais.


Envie de tout casser
Les poings fermés
Je ne pense qu'à ça
Tout jeter
Meubles
Télé
Ordinateur
Le sommeil pour se sentir mieux


Les yeux qui brillent
Décontracté
Envie de courir dans la mer
Envie de grimper dans les dunes et peur de se faire emporter par les sables mouvants
Courir à contrecourant
Pousser contre le vent
Tomber dans les vagues
Se relever
Pas de trace ce n'est que de l'eau.



Lien vers le lycée : www.lycee-professionnel-chenneviere-malezieu.fr/


Avec le soutien de la Direction régionale des affaires culturelles d'Ile-de-France - Ministère de la Culture et de la Communication et avec le soutien d'Arcadi Ile-de-France


12.1.15

Je suis Charlie (2)

Hier, 11 janvier 2015, nous n'avons pas joué "Tu trembles" de manière à marcher de la République à la Nation en mémoire des victimes des attentats et pour la liberté d'expression. Mercredi, le 7, c'était notre première. La représentation, on s'en doute, fut bouleversante, le texte entrant continuellement en résonance avec l'actualité et le massacre à Charlie Hebdo. Au moment du noir final et des applaudissements, la Compagnie a proposé que je dépose une bougie allumée en avant-scène. Ainsi chaque soir "ils" saluent avec nous...

vers Richard Lenoir

à Saint Ambroise